mercredi 25 septembre 2013

Loi interdiction cumul des mandats

Suite au vote au Sénat sur l’interdiction du cumul je tiens à faire part de mon mécontentement sur la manière dont se sont déroulés les débats et sur l’issue négative du vote.
En effet, lors des séances des 18 et 19 septembre derniers sur le projet de loi « interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur », le Sénat a rejeté le texte proposé par le Gouvernement mais a adopté un texte permettant aux sénateurs  (mais pas aux députés) de cumuler avec un mandat exécutif local.
Cette majorité a été possible grâce à une alliance entre UMP, centristes et les radicaux de gauche qui l’ont quasiment unanimement voté. Malheureusement, quelques sénateurs socialistes ont conforté cette majorité, et d’autres ont refusé de prendre part au vote ou se sont abstenus.

Je souhaite vous confirmer que j’ai clairement défendu le texte du gouvernement, en particulier par une intervention lors de la discussion générale, à la tribune (Lien vers mon intervention). Bien entendu j’ai également voté contre les amendements qui s’y opposaient.
Je voudrais vous réaffirmer ma profonde conviction en faveur de la loi anti cumul qui va contribuer :
-      à moderniser la vie publique.
-      à renouveler la classe politique en assurant une meilleure représentation des femmes et des jeunes quelques soient leurs origines.
-      et à assurer une véritable séparation entre le législatif et l’exécutif.


Ci-dessous le texte de mon intervention au Sénat:

SEANCE DU 18 septembre 2013 PROJET DE LOI INTERDICTION

M. le président. La parole est à M. Claude Dilain.
M. Claude Dilain. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, alors que nous nous trouvons au cœur de ce débat passionné, je me permets de rappeler que la passion n'interdit pas le respect, tant des opinions exprimées que de celles et ceux qui les défendent. Nous avons tous la volonté de voir le Sénat sortir grandi de nos échanges : à cet égard, il me semble que l'issue de ce débat ne sera pas le seul élément à compter ; sa teneur et sa qualité auront aussi leur importance.
À ce stade, beaucoup de choses ont été dites. Pour ma part, je ne souhaite pas engager le débat sous l'angle des problèmes de disponibilité. Après tout, il s'agit là d'une question d'organisation personnelle. Je ne souhaite pas non plus l'aborder en évoquant les indemnités. Ces dernières font déjà l'objet d'un écrêtement et il suffit de décider qu'on ne peut avoir qu'une seule indemnité pour régler la question. Je me demande d'ailleurs pourquoi nous ne l'avons pas fait plus tôt, puisque tout le monde semble d'accord sur ce point… Enfin, je n'aborderai pas la problématique au travers des questions juridiques. Les positions avancées dans ce cadre sont nombreuses et contradictoires, et je n'ai pas l'expertise pour les arbitrer.
En revanche, je voudrais poser deux questions.
La première question porte sur la légitimité de la représentation. Dès lors que, selon la Constitution, le Sénat représente les collectivités territoriales de la République, qui a le plus de légitimité pour mener à bien cette mission ?
De toute évidence, les élus locaux, en particulier les maires, ont cette légitimité. Personne ne peut le nier ! Dans le cadre de son mandat, un maire acquiert un certain nombre de connaissances (M. Yves Détraigne opine.) qui lui permettent d'appréhender comment la loi votée par le Parlement sera appliquée sur le terrain. Or il s'agit bien de cela, d'être capable d'envisager les conséquences pratiques de l'exécution de la loi !
Mais cette légitimité vaut aussi pour les anciens maires. On ne devient pas amnésique parce qu'on a été élu sénateur ! À titre personnel, je me souviens parfaitement des seize années que j'ai passées à la mairie de Clichy-sous-Bois. Tout ne s'est pas envolé d'un seul coup ! D'ailleurs, M. Hugues Portelli a oublié un détail en évoquant le cursus honorum : en changeant de fonction, on abandonnait l'ancienne ; on n'était pas tribun et questeur en même temps.
Voilà donc un point très important. Rien n'interdit à un élu local de devenir sénateur, mais rien ne l'empêche non plus de démissionner. Son expertise et sa légitimité n'en seront pas diminuées.
Par ailleurs, il n'est pas forcément nécessaire d'être maire ou président d'un exécutif local pour acquérir cette expertise. Je ne suis pas d'accord avec les propos qui ont été tenus sur le sujet, selon lesquels un conseiller municipal n'a pas le même niveau d'expertise. Bien sûr que si ! Il connaît aussi son territoire. Je dirai même, quitte à faire un peu de provocation, qu'il a dans certains cas une meilleure connaissance de la population que le maire lui-même, plus au fait des dossiers que de la situation de ses administrés.(Protestations sur plusieurs travées.)
M. Raymond Vall. C'est nul !
Mlle Sophie Joissains. C'est faux !
M. Claude Dilain. Je savais que mes propos allaient susciter des réactions.
J'ai entendu à plusieurs reprises que nous devions être enracinés dans le territoire. Mais les élus locaux sont-ils les seuls à l'être ? Ne pensez-vous pas, mes chers collègues, qu'un médecin,…
M. Éric Doligé. Il n'y en a plus !
M. Claude Dilain. … un commerçant, un éducateur, un enseignant n'a pas une connaissance aussi approfondie de son territoire ? Je vais vous faire un aveu : pendant plus de seize ans, j'ai cumulé la fonction de maire de Clichy-sous-Bois et une activité de pédiatre libéral dans cette ville, et je vous assure que j'ai appris autant de choses dans mon bureau de maire que dans mon cabinet de médecin.
M. Claude Dilain. L'expertise dont je me sers ici, je la tire autant de la première expérience que de la seconde !
S'il est indiscutable que les élus locaux ont un point de vue sur les questions que nous traitons dans cette enceinte, ont-ils pour autant le monopole de la défense des collectivités territoriales ? Non ! Il serait donc intéressant que d'autres points de vue puissent aussi s'exprimer.
M. Gérard Longuet. Mais ils s'expriment !
M. Claude Dilain. Je dirais même qu'à travers son activité le Sénat peut permettre de rassembler ces différents points de vue.
La seconde question – je m'étonne que l'on n'en parle pas plus – est celle du conflit entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.
Vous allez me dire que le pouvoir législatif national n'a rien à voir avec un pouvoir exécutif local… Relisez les comptes rendus de nos séances ! Vous verrez combien de présidents d'exécutif local, à cette tribune, ne font que défendre les intérêts de leur collectivité territoriale.
M. Rémy Pointereau. Et alors ?
M. Claude Dilain. Je ne les blâme pas. Ils ont été élus pour cela.
M. Claude Dilain. Ils doivent donc le faire. Mais si nous avons été élus à l'Assemblée nationale ou au Sénat, c'est pour élaborer la loi de tous les Français !
M. Gérard Longuet. Pas seulement !
M. Claude Dilain. Il y a là, me semble-t-il, une confusion très préjudiciable et j'en ai assez d'entendre des membres de cette assemblée, dans cet hémicycle, prétendre que ce qui est bon pour leur ville l'est aussi pour la France et que ce qui n'est pas bon pour leur ville ne l'est pas non plus pour le pays. Je vous assure que je ne suis pas caricatural…
Enfin, s'agissant de la question du contre-pouvoir, le professeur Olivier Beaud nous a expliqué lors de son audition que les « barons locaux » – il a, me semble-t-il, employé le terme – étaient nécessaires car ils constituaient un contre-pouvoir. Certes, mais avez-vous vraiment le sentiment que les citoyens aspirent à ce genre de contre-pouvoirs ? N'attendent-ils pas autre chose ? C'est un point important et je vous demande d'y réfléchir.
Pour toutes ces raisons, c'est en conscience que je voterai ce texte, et non simplement pour respecter un engagement du Président de la République ou une consigne. (Bravo ! et applaudissements sur de nombreuses travées du groupe socialiste. – Mme Hélène Lipietz applaudit également.) "

1 commentaire:

  1. Le non-cumul des mandats est une nécessité pour la classe politique, si elle souhaite vraiment regagner un peu de la crédibilité qu'elle a perdu sur les vingt dernières années. Le Sénat, et plus globalement le bicaméralisme, est essentiel à l'équilibre de nos institutions. Et je crois sincèrement qu'il est essentiel que chacun se concentre sur ses tâches et sur son rôle, et même si un sénateur représente une collectivité, dans le fond son travail, comme le dit si bien M. DILAIN, est très différent de celui d'un maire. A ce titre il est porteur de la parole de l'ensemble et non d'un groupe, même s'il tire de ce groupe (population) l'essentiel de son expérience. Donnez le moyen aux élus locaux et aux administratifs de s'enorgueillir de ce choix, ainsi qu'aux sénateurs bien entendu, la relation de confiance doit être rétabli pour construire ou reconstruire.

    RépondreSupprimer